Brundlestein
Le personnage
principal, Seth Brundle, est un scientifique aux allures de savant fou, tant
par son physique, qui se caractérise par ses cheveux longs et ébouriffés, que
par son comportement asocial, renfermé sur lui-même. Le réalisateur fait ainsi
un clin d’œil direct à un autre savant fou, Albert Einstein, qui est même cité
lorsque Seth justifie le fait qu’il n’ait que des tenus identiques pour les
sept jours de la semaine afin de ne pas perdre de temps dans le choix
vestimentaire.
Il est passionné par son métier,
allant même jusqu’à vivre dans son laboratoire se coupant volontairement du
monde extérieur. Il n’a donc aucune relation avec autrui, tant sentimentale
qu’amicale, et vie comme un hermite.
Le
labo : lieu de vie ou tombeau ?
Le réalisateur
a créé un endroit sombre, lugubre, très peu éclairé par des vitres fumées,
opaques, qui n’ouvrent sur aucune échappée. Le lieu de vie de Seth fait penser
à un hangar désaffecté qu’on pourrait qualifier de squat et qui par sa
dimension emmurée et sépulcrale renvoie à l’image du tombeau. Tout cela
s’oppose au bureau de Stathis, avec des baies vitrées largement ouvertes sur
l’extérieur.
En effet, les lumières et le
décor nous laissent imaginer que c’est ici qu’il finira ses jours.
De plus, la majorité des scènes
du film se déroulent dans le laboratoire. Au début ce dernier est bien rangé,
mais il va se dégrader au fur et à mesure du film, subissant une
transformation : au départ c’est un lieu de vie, et au final une
sépulture.
Voyage vers
le divin
Seth
travaille sur un projet technologique révolutionnaire : la téléportation.
Cela consiste à désintégrer les cellules d’un corps en un point A et de les
reconstituer en un point B. Etant lui-même victime du mal des transports, que
ce soit en voiture ou en tricycle lorsqu’il était enfant, cela pourrait lui
permettre de parcourir une large distance en très peu de temps sans en
souffrir.
Au-delà de cela, Seth, par ses recherches, se rapproche d’une certaine
manière du créateur, de Dieu. En effet, ses expériences cherchent à modifier la
nature humaine dans son essence même. Le scientifique est ainsi assimilé à un
démiurge. L’utilisation par Cronenberg du chiffre trois, trois télépodes, trois
personnages principaux, n’est pas sans rappeler la Sainte trinité.
Mais son invention ne s’arrête
pas là. En effet, Seth se rendra compte qu’il est difficile d’imiter l’œuvre de
Dieu, car il parvient à déplacer des objets sans vie, mais lorsqu’il applique
le phénomène sur lui-même, un simple concours de circonstances va lui coûter la
vie.
Un embryon
technologique
Dans les
années 80, la téléportation n’existe pas. Et la manipulation génétique en est à
ses balbutiements. A son insu, Seth va faire de son laboratoire un lieu
d’abomination.
Trois télépodes sont nécessaires
à la téléportation. Seulement deux sont actifs jusqu’à la fin du film, puis un
troisième s’ajoute à la toute fin, sans vitre, avec une porte opaque. Ils sont
tous trois reliés par des câbles à un ordinateur qui fait office de base
centrale.
Le troisième télépode est le plus
important. En effet, il s’agit d’un prototype, sous une bâche pendant tout le
film, mais c’est lui qui permettra de faire apparaître la créature organique et
mécanique finale. On remarque que chaque télépode adopte une forme archaïque et
en même temps révolutionnaire, renvoyant à des carapaces d’animaux géants, à
des œufs et leur intérieur utérin (en particulier lorsque Seth est nu à
l’intérieur, et qu’un disque de lumière blanche figure la rondeur et le coton).
Un câble reliant la fusion finale et le télépode fait même penser à un cordon
ombilical.
De plus, à chaque fois qu’on voit
le télépode après une téléportation, on remarque une forte présence de brume
qui cache le résultat, mettant place au suspens quant à l’apparition de la
création.
PARDIES Yannick